Le dessous des cartes
Lac D'alfeld dans les Vosges
Un grand pays est semblable aux basses terres,
Vers lesquelles s’écoulent tous les ruisseaux.
Il est le réservoir de tout ce qu’il y a sous le ciel.
Lao-Tseu
Je pris délicatement le papier et entrepris de le déplier,
il contenait des cartes avec des gravures.
Je déchiffrais la page à l’écriture à demi effacée :
« N’oublie pas de lire entre les lignes et de regarder derrière les mots, de retourner la page blanche pour apercevoir le dessin et de retourner les cartes pour lire ce qui te semble vide. C’est là ta première arme.
Sans doute auras-tu besoin d’un autre sens que ton regard et tes oreilles, celui qui te fait entendre au-delà des apparences, celui qui te laisse deviner pas à pas ou soudain ce qui t’est nécessaire ou utile à autrui. Une intuition particulière dans laquelle tu te tromperas humblement mais où tu apprendras à percevoir. Il s’agit de ta deuxième arme. »
Dans un premier temps je ne vis rien d’autre sur les cartes que des dessins de paysages, d’animaux et de petits personnages, mais en les observant recto verso j'aperçu des messages :
« Le sabre de la créativité peut faire tomber des armées malveillantes.
L’épée du courage est prête à t’accompagner jusqu’au bout de tes nuits.
Le souffle que te donne l’univers t’apporte l’essentiel pour traverser les marais du désastre.
Le bouclier de l’intégrité te permet de rester intact, il est à lui seul un gage de liberté.
Tu trouveras dans le dédale de l’imperfection ce qui permet de slalomer dans le quotidien des malheurs.
La longue vue agrandit chaque pépite de bonheur et la prolonge, elle agrandit le paysage, fait d’un carré de terre un jardin, d’une simple étoile un univers, d’un trait de crayon un tableau, d’un fruit un repas merveilleux.
La bonté est à double tranchant, utilise là à bon escient.
A toi d’inventer tes propres armes. »
Voilà qui me laissa un peu désarçonnée !
Je passais ma journée à retourner les cartes, je les gardais dans ma main comme un cadeau, en mis une dans ma poche et une autre dans ma sacoche pour aller marcher dans la montagne.
Je m’endormis tôt ce soir là, dans un calme royal. Étrangement
je ne rêvais point de montagnes, mais d’un vaste océan, il était à la fois
paisible et puissant, des terres sous marines apparaissaient comme dans un
miroir et les rivières le rejoignaient. Plus bas et au-dessous de toute terre
ferme l’océan captait l’essentiel du monde et recevait ses nutriments comme ses
déchets, réceptacle profond de tout ce qui bruisse ou se tait.
Je perçu le silence comme une arme invisible apte à produire des ondes favorables au bien- être du monde. Je restais immobile et reçu quelque chose qui s’inscrivit dans mon âme, il me suffirait de fermer les yeux n’importe où pour revivre cet instant et en recevoir l’essence.
Quand je m’éveillais j’aperçu le ciel de la nuit par la fenêtre ouverte, il semblait être un océan de flots bleus où se reflétaient les montagnes et où chaque étoile chantait.
Feuille